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Les états d'âme de MZ

Ancien Chargé de mission international à la Cfdt, Chargé de cours à Sciences Po sur le dialogue social européen, conférencier occasionnel, je partage certains de mes états d'âme avec mes frères et sœurs en humanité.

Réformer n'est pas français !?

Nous vivons une période riche en abus de langage qui conduit à perdre le sens des mots comme social : distanciation sociale, réseaux sociaux...
Quant à dialogue social, de quoi s'agit-il ? Il produit pourtant des résultats intéressants quand on en connaît le mode d'emploi.

Savez-vous qu'au total le salaire minimum1 aura été relevé de 47 % depuis l'arrivée au pouvoir des socialistes en juin 2018 ?

Vous aurez sans doute compris que ça ne s'est pas passé en France...

De fait, c'est en Espagne que cette “grave erreur économique” (la CEOE2 dixit) a été commise. Les polémiques autour du relèvement du SMI de España ont accompagné toute la législature de Pedro Sanchez. Tandis que les syndicats réclamaient de faire converger les salaires vers le reste de l'Europe, certains experts avertissaient du risque de déséquilibrer les secteurs les plus fragiles de l'économie et de provoquer la destruction d'emplois. En dépit de ces mauvais augures, les effets adverses sont restés jusqu'ici mineurs et l'Espagne a continué de créer des emplois, avec près de 280.000 nouveaux postes en 2022.

Il y a, me semble-t-il, deux enseignements principaux à tirer de cette aventure ibérique :
- L'investissement social n'est pas l'ennemi de l'économie, ce qui conforte un prix Nobel d'économie justement attribué en 20213.
- Pratiquer la sociale-démocratie
4 est le meilleur gage de la paix sociale.

Pendant ce temps, de notre côté des Pyrénées, les syndicats5 sont unanimement dressés contre la réforme des retraites que le pouvoir politique entend réaliser à tout prix, au prétexte que le processus parlementaire engagé détient toute la légitimité démocratique.

En refusant de recevoir les syndicats, le président Macron commet une erreur grave : il tenait l'occasion de corriger une posture autoritariste, tout en permettant aux centrales syndicales réformistes de retrouver la voie du compromis social attendu par une majorité de la population.

Ce choix réitéré d'une république monarchique, coupée de la réalité du monde du travail, ne présage rien de bon pour le pays, et on peut craindre que le parti aux 89 élus pseudo-démocrates, tapis gentiment en embuscade à l'assemblée nationale, ne tire bientôt les marrons de la flambée sociale à venir.

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1. À propos de salaire minimum, j'en profite pour souligner que le Conseil de l'UE a approuvé la directive européenne, après que le parlement européen l'a validée en septembre dernier. Pour en savoir plus, voyez ici
2. La Confederación Española de Organizaciones Empresariales (Confédération espagnole des entreprises) est une institution espagnole fondée en juin 1977 qui représente les entrepreneurs espagnols (l'équivalent du MEDEF français).
3. Cf. mon article À rebours des idées reçues du 5 novembre 2021 ici
4. Dans son acception moderne, la pratique sociale-démocrate consiste à associer les partenaires sociaux à la gouvernance politique. Pour en savoir plus voyez l'article très documenté de Wikipédia.
5. On peut dire en ce moment "les" syndicats puisque le mouvement de protestation est unitaire : avez-vous remarqué que l'unité intersyndicale française ne se réalise que dans l'affrontement ?

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