Et voici qu’un Président-candidat, entré enfin en campagne, si on peut appeler ça comme ça, nous annonce qu’il est « prêt à augmenter substantiellement les professeurs s’ils sont prêts à aller vers de nouvelles missions […]. C’est difficile de dire qu’on va mieux payer tout le monde, y compris ceux qui ne sont pas prêts à faire plus d’efforts », accréditant ainsi l’idée qu’ils se la coulent douce, voire même qu’ils sont fainéants et incompétents !
Autrement dit « travailler plus pour gagner plus » selon la formule qui avait fait florès à l’époque d’un président de droite qui ne se prétendait pas en même temps de gauche.
Faut-il imaginer que cette idée géniale a été soufflée au sémillant Macron par son ineffable ministre de l’Éducation qui s’y connaît en management ? Le caporal-chef des profs rêve de ne voir qu’une seule tête de ses troupes standardisées et entend mettre au pas les gauchistes et autres trublions qui veulent éduquer sans se plier à la discipline hiérarchique.
Depuis plus de vingt ans, les États membres de l'UE coopèrent à travers la MOC (Méthode ouverte de coordination) et les politiques d’éducation et de formation ont acquis une place particulièrement importante depuis l’adoption, en 2000, de la stratégie de Lisbonne qui fait de la connaissance le pilier du développement économique et social.
En termes de rémunération*, la France est à la traîne et c’est particulièrement criant dans l’enseignement primaire public où le salaire des enseignants est plus faible en France (35.600 € pour un enseignant titulaire) qu’en Allemagne (62.000 €), au Royaume-Uni (37.500 €) et dans les pays du Nord comme les Pays-Bas (49.300 €), la Finlande (41.800 €) ou la Suède (40.200 €).
Concernant la taille des classes*, c’est le Royaume-Uni qui connaît la moyenne la plus élevée en élémentaire, avec 27 élèves par classe, suivi par la France avec 24, quand le minimum est observé en Lettonie et au Luxembourg, avec 16 élèves par classe. Au niveau du collège, l’Espagne et la France connaissent les classes les plus chargées, avec 25 élèves par classe ou plus.
Quant à la charge globale de travail, voyez ici un article paru dans Les Echos en 2016 évoquant le véritable temps de travail des enseignants (estimé réellement dans une moyenne de 44h à 52h !), fondé sur une étude édifiante de l’INSEE. En outre, une polémique imbécile sur l’absentéisme des enseignants durant le confinement de 2020, avait entrainé une lettre ouverte vigoureuse des inspecteurs académiques s’étonnant du « silence » de M. Blanquer « sur ce qui touche pourtant à la conscience professionnelle des enseignants et à leur engagement. Pourquoi ne pas assurer les enseignants, mais aussi les personnels d’éducation, les encadrants, de la confiance de l’Etat et de votre soutien face à cette désinformation ? ».
La bonne question est de savoir si la France se donne les moyens de respecter ses valeurs proclamées : L'école est le creuset de la Nation et elle porte l'égalité républicaine.
Il est bien évident qui si des efforts doivent être faits, ils doivent l’être d’abord au niveau de l’État qui serait bien inspiré de cesser de stigmatiser la communauté éducative, surtout après qu’elle a tenu l’école durant deux ans de pandémie, malgré des instructions frénétiques et inapplicables, en subissant de surcroît de brutales disparitions traumatisantes.
* Source : « L’Europe de l’éducation en chiffres - 2020 », édité par le ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports et le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation.